Au revoir Purgatoire

« La magie mon garçon, ça n’existe pas ! » Voilà la seule phrase qui avait dirigée la vie d’Isabelle depuis les derniers mois. Et Dieu sait que cette phrase avait été mise à l’épreuve. Entre tous ces gens qui s’affublaient de fausses ailes et ceux qui s’accrochaient de stupides cornes sur la tête, elle commençait à douter. Et combien de fois avait-on tenté de lui faire croire qu’elle était un ange ? Gab’ lui avait même donnée un miroir pour qu’elle puisse regarder ses propres ailes dans son dos. Evidemment il n’y avait rien : elle aurait eu des ailes et une auréoles, elle l’aurait su !
Aujourd’hui, elle n’avait pas vraiment le cœur à rire. Elle attendait sur le banc. Toutes ses copines étaient déjà parties. Elle était toute seule. La semaine de plus que ses parents lui avaient laissé se terminait aujourd’hui. Ils étaient tous partis. En fait, elle devait être restée bien plus que ce qui était prévu. Tout avait commencé il y a quelques mois. C’était la sortie des cours. Et les troisièmes étaient venus devant la sortie de l’école primaire. Non mais pour qui ils se prenaient à vouloir racketter les CE1 ? En tout cas elle, elle devait rentrer en 6e l’année prochaine et elle ne s’était pas laissée faire. Bien sûr, qu’ils étaient méchant, mais elle courut vite. Suffisamment vite pour trébucher au pied de la Grande Dame qui l’amena chez elle, dans sa super colonie de vacances. Là elle avait passé des super journées avec de nouvelles copines : elles avaient fait des poufs rouges, rencontré Pépé Anaal, bref tout ce qui se faisait de mieux. Et surtout ce qui la fascinait c’était tous ces gens qui n’avaient pas compris qu’il ne s’agissait que d’un jeu : en réalité les anges et les démons ça n’existe pas, c’était comme la magie. Alors même s’ils faisaient semblant d’avoir mal quand on leur arrachait une plume de leurs fausses ailes, elle n’était pas dupe : on ne lui faisait pas avaler n’importe quoi à elle !
Bref ça avait été de super vacances, et en plus quand ses parents étaient venu la chercher elle les avait convaincu de la laisser encore un peu là bas. Mais tout devait se terminer. Dans deux jours elle entrerait au collège et peut-être plus jamais elle ne verrait de grandes personnes avec des cornes sur la tête faisant de grands gestes qui se voulaient terrifiants. Elle se retrouvait là, ses pieds se balançaient dans le vide alors qu’elle était assise sur le banc.

La voiture s’arrêta juste devant elle et une Dame lui fit un sourire.

« Tu montes ma chérie ?
_Oui, oui…
_Alors c’était bien ces vacances ?
_Oui, oui…
_Vous avez fait quoi ?
_Oui, oui… »

Elle hissa difficilement ses valises dans le coffre et se posa sur la banquette à l’arrière. Elle n’écoutait pas vraiment ce que sa mère lui disait. Elle repensait avec tristesse à tous les gens qu’elle avait laissé. Elle n’avait pas eu le courage de leur dire « au revoir ». Sinon ils l’auraient vu pleurer et ils l’auraient pris pour une petite fille. Peuh… « J’suis sûre que Hérétik il se serait moqué de moi… ».

La voiture démarra. Isabelle laissait le purgatoire derrière elle. Elle pensa avec angoisse au beau message qu’elle leur avait laissé sur la table :

« Aujourd’ui mais parents vienne me chercher donc je vous dit enrevoir. Surtous à Shana, Gab’, Lumi, Hérétik, Damanhur, Pépé Anaal, et Madame Omisha !
Je vous aiment tous bocoup. Moi, je doigt partir.

C’été super avec vous !

Isabelle »

Elle était fier de ce qu’elle avait écrit : elle s’était tout particulièrement appliquée à bien écrire.

La voiture roulait et le jeune angelle était plongée dans ses pensées. Demain tout redeviendrait normal et elle se préparerait pour la rentrée. Elle eut un sourire et elle ferma les yeux. Ces vacances, ça l’avait vraiment fatiguée !